Trois parfums signés Soraya Bakhtiar
Quelle est votre madeleine de Proust en tant que parfum?
C’est l’odeur de mon doudou que j’emmenais partout avec moi jusqu’au début de l’adolescence. Je ne m’en cache pas. La raison principale était qu’avec tous mes voyages, cette odeur me rappelait la maison. C’est un peu ce qu’on a voulu créer avec Voile de Lune, un parfum intemporel.
Est-ce que créer votre parfum était un rêve d'enfant?
Absolument! Depuis toute petite, ma famille et moi passions nos étés dans le sud de la France, près de Grasse, là où Azaleo a été conçu. Enfant, je collectionnais déjà les bouteilles de parfums et j’arrachais les pages des magazines où des testeurs étaient collés pour les sauver précieusement dans un classeur. Mon papa me ramenait toujours aussi des parfums en rentrant de ses voyages d’affaires. J’ai toujours eu une sensibilité pour les parfums, c’est la meilleure thérapie pour moi. Je peux m’évader des heures dans ma tête si l’odeur me ramène à un souvenir de vacances, par exemple.
Comment s'est déroulée cette aventure olfactive?
J’ai d’abord voulu suivre une mini-formation pour connaître tout le jargon de l’industrie. Puis mon activité de blogueuse de mode commençait à tourner en rond et je voulais absolument créer quelque chose de tangible. Il m’est paru évident, il y a trois ans exactement, de me lancer dans cette folle aventure. De fil en aiguille j’ai tissé ma toile et rencontré les bonnes personnes qui m’ont aidée. C’est comme si c’était « meant to be », tout s’est fait naturellement.
Quelles ont été vos inspirations ?
L’imperceptible: de l’émotion, aux odeurs de voyage ou d’être cher. Les couleurs douces et l’astrologie. C’est comme cela que j’ai pu traduire à Stephanie Bakouche, le nez derrière Azalée, l’interprétation de mes rêves. Nous avons eu de longues réunions où je lui parlais d’émotion. Pour Voile de Lune, par exemple, je voulais quelque chose de doux, deuxième peau, une odeur de propre mais sensuelle à la fois, tout en restant discrète. Je voulais qu’on puisse la confondre avec l’odeur de la peau. Doux comme un doudou, une caresse ou comme un rayon de lune sur la peau. Un peu mystérieux. Stéphanie a tout de suite compris et j’étais séduite dès les premiers essais. Voile de Lune était notre point de départ et nous avons par la suite développé Sun to Soul et Bois Bohème qui viennent s’additionner, suivant le principe du layering, à Voile de Lune, qui fait office de base.
Qu'est-ce que vous ne vouliez surtout pas faire avec vos parfums?
Tomber dans des odeurs commerciales. Hélas, j’ai vite compris que dans ce milieu les odeurs pouvaient devenir « tendance ». Je voulais éviter cela et vraiment laisser la place à la création. Tous nos parfums sont vraiment uniques. Créer un parfum c’est très personnel, et c’est une loterie, on ne sait jamais si cela va plaire aux autres ou pas. C’est pourquoi je voulais absolument créer des parfums pour moi en premier sans avoir quoi que ce soit d’autre en tête.
Je rêvais d’un parfum solaire mais pas entêtant, de là est né Sun to Soul. De même, je voulais un oriental/boisé revisité avec une pointe d’épices et de vanille, sans tomber dans quelque chose de gourmand. Cela me rappelait l’odeur d’être dans les bras de mon mari lorsque nous nous sommes rencontrés.
Le plus grand piège à éviter, je dirais que c’est de faire un parfum pour les autres. Et puis, les parfums c’est comme la mode. On aime certaines choses ou on ne les aime pas, cela nous va ou ne nous va pas. Les goût et les couleurs, c’est personnel.
Quels sont les ingrédients phares de votre parfum?
Tous nos parfums ont ce fond très boisé musqué car je trouve que cela ajoute beaucoup de profondeur à un parfum, sans parler d’une meilleure tenue. Certains muscs ont des facettes différentes comme le Iso E Super. Du coup, il évolue complètement différemment d’une peau à une autre. C’est d’ailleurs l’ingrédient qui a fait le succès de la marque Molécules. En revanche, nous l’avons allié à d’autres matières premières dans ce même univers. C’est ce qui au final a rendu chaque parfum d’Azaleo si unique.
Quelle a été la première personne à sentir votre parfum?
Mon mari, c’est lui qui m’a encouragée dans cette aventure dès le début. Il m’a poussée à matérialiser ce rêve d’enfant. Il m’a soutenue dans les moments difficiles où je voulais parfois tout abandonner parce que la route était dure. Il a une grande sensibilité pour les parfums et il a un franc-parler, il est parfois trop honnête et ne mâche pas ses mots. Du coup, je savais que son opinion était importante.
Comment avez-vous choisi le nom de votre marque?
Il m’a fallu du temps pour trouver un nom. Je voulais créer un univers complètement imaginaire et quelque chose qui reflète les parfums et ma passion pour l’astrologie. Du coup Azaleo n’est autre que as a leo en anglais, car je suis née sous le signe du lion. Azaleo me fait aussi penser aux Azalées et « leo » sonne un peu comme l’eau, l’eau de parfum. C’est venu d’un coup et je ne pouvais pas penser à un autre nom.
Avez-vous déjà le projet de lancer d'autres fragrances ou de développer votre marque avec, par exemple, des cosmétiques ?
Oui, évidement, j’adorerais, mais cela demande du temps et de l’argent. Pour le moment, je veux faire vivre la marque et ces trois parfums. On est aussi dans une ère post-Covid où il nous faut ralentir le rythme et ne pas tomber dans la sur- consommation. Tout en douceur, je songe déjà à la suite.
Les cosmétiques, en revanche, ne font pas du tout partie de mes intentions. Je souhaite rester dans l’univers olfactif. La suite logique serait peut-être des bougies ou d’autres types de parfums d’intérieur. A voir…
Azaleo, en plus d’être une marque de parfum, est un univers tourné vers le wellness, et tout ce qui touche au mind/body/soul.
Un parfum qui vous fait craquer et que vous auriez aimé créer?
Impossible de répondre à cette question. Il y a en a plus qu’un qui me fait craquer, mais je ne me suis jamais dit que j’aurais voulu les créer. Si c’était le cas, cela révèlerait d’une forme de jalousie ou d’envie à des fins commerciales. Je trouve que chaque parfum est différent et a sa place. Vous voyez ce que je veux dire? C’est comme si je vous demandais si vous auriez aimé créer l’enfant d’un autre que le vôtre.